- ÉPIPHYSE
- ÉPIPHYSEL’épiphyse, ou glande pinéale, est une petite glande du toit du diencéphale dont la fonction est restée énigmatique pendant de nombreuses années. «Siège de l’âme» pour Descartes, elle a été longtemps considérée comme une sorte de troisième œil chez les Vertébrés inférieurs et comme un vestige calcifié chez les Mammifères. L’épiphyse est certainement l’un des organes dont l’architecture varie le plus dans l’échelle des Vertébrés. Simple évagination du toit du diencéphale contenant des photorécepteurs chez les Poissons, les Batraciens ou certains Reptiles, elle apparaît comme un organe glandulaire contenant des cellules sécrétoires (pinéalocytes) chez les Mammifères. Du fait même de sa diversité de structure, elle a généralement été considérée comme un organe sensoriel de type photorécepteur chez les Vertébrés inférieurs et comme une glande endocrine à fonction antigonadotrope plus ou moins bien définie chez les Mammifères. On sait que l’épiphyse, ou glande pinéale, n’est pas une glande endocrine classique, mais qu’elle contribue à la synchronisation d’un certain nombre de fonctions rythmiques (nycthémérales ou saisonnières) avec les variations des facteurs physiques de l’environnement.L’isolement, en 1959, par un chercheur américain, A. B. Lerner, d’une substance libérée par la glande pinéale, appelée mélatonine, a marqué le début d’une ère nouvelle en ce qui concerne les recherches sur la physiologie de cet organe. Deux résultats importants datent de cette époque:– la synthèse de mélatonine est contrôlée par l’alternance jour-nuit;– la mélatonine intervient dans le contrôle des cycles de reproduction chez les Mammifères.À partir de ces résultats, dès 1969, un auteur américain, W. B. Quay, a suggéré que la glande pinéale est principalement impliquée dans les phénomènes d’adaptation des animaux à leur environnement.À l’heure actuelle, un rôle physiologique de la glande pinéale est démontré dans trois domaines: 1o la synchronisation des cycles saisonniers de reproduction; 2o la synchronisation d’un certain nombre de rythmes nycthéméraux; 3o la thermorégulation.1. Glande pinéale et synchronisation de l’activité sexuelleLa plupart des Vertébrés qui habitent les zones tempérées ou arctiques ont un cycle de reproduction annuel. Pour le maintien de l’espèce, il est essentiel que les jeunes naissent ou soient sevrés au moment où les conditions de survie sont les meilleures, généralement le printemps ou l’été sous nos latitudes.Les variations saisonnières de la photopériode sont intégrées par de nombreux animaux des zones tempérées ou arctiques pour réguler leur cycle de reproduction.Les premiers résultats montrant le rôle de la glande pinéale comme intermédiaire entre les variations de la photopériode et l’activité sexuelle sont dus à une équipe de chercheurs français de Lyon (Czyba et coll.). Ces travaux ont été largement développés depuis, en particulier chez le hamster doré, petit Mammifère hibernant dont le cycle sexuel saisonnier peut se diviser en quatre phases:– une phase d’inhibition, induite par la décroissance de la longueur des jours en automne, caractérisée par la régression des gonades et des organes sexuels secondaires;– une phase de repos sexuel, phase d’hibernation de l’animal, où les gonades sont atrophiées;– une phase de restauration, débutant à la fin de l’hiver lorsque les jours s’allongent, caractérisée par la réactivation des gonades;– une phase d’activité sexuelle au printemps et en été, au cours de laquelle les animaux se reproduisent.Il a été démontré expérimentalement que l’involution des gonades, induite par la décroissance de la longueur des jours en automne, est empêchée par la pinéalectomie (ablation de la glande pinéale) préalable. De plus, la pinéalectomie effectuée pendant la phase de repos sexuel conduit à une reprise de l’activité sexuelle et de la reproduction (R. J. Reiter, 1975).Les mécanismes précis par lesquels la glande pinéale agit sur l’axe sexuel ne sont pas encore établis de façon certaine. Parmi les substances produites par la glande pinéale, les dérivés hydroxy- ou métoxyindoliques (cf. figure) occupent une place importante; la mélatonine en particulier apparaît physiologiquement très active et est capable de reproduire la plupart des effets de l’obscurité sur le cycle sexuel.Si l’on maintient à la fin de l’été des animaux en jours longs avec un éclairage artificiel, les gonades restent actives. En revanche, si les animaux reçoivent une injection journalière de mélatonine en fin d’après-midi, les gonades involuent au bout de quatre semaines. Cependant, l’action de la mélatonine apparaît très complexe et dépend à la fois de la dose, du mode d’administration, de l’état physiologique de l’animal et de la phase du cycle annuel de reproduction. Dans certains cas elle peut même exercer des effets progonadotropes. Aussi, si certains auteurs (Reiter, 1981), considèrent la mélatonine comme l’hormone épiphysaire inhibant le système reproducteur, d’autres (Hoffman, 1981) voient en elle uniquement un facteur épiphysaire intervenant dans la transmission du message photopériodique.Toutefois, la mélatonine n’est que l’un des dérivés indoliques synthétisés par la glande pinéale et il existe en particulier d’autres dérivés méthoxyindoliques: le 5-méthoxytryptophane, la 5-méthoxytryptamine, le 5-méthoxytryptophol ou l’acide 5-méthoxy 3 indole acétique. Ils proviennent, comme la mélatonine, de la méthylation de 5-hydroxyindoles par l’enzyme hydroxyindole-0-méthyltransférase, HIOMT, (cf. figure). Certains comme la 5-méthoxytryptamine sont également capables, dans certaines conditions, de reproduire les effets de la photopériode sur les cycles sexuels.Enfin, l’intervention d’autres substances de nature protéique ou peptidergique est également suggérée par de nombreux auteurs, mais les recherches d’identification chimique de ces substances n’ont pas encore abouti.À l’heure actuelle, il est ainsi expérimentalement prouvé que la glande pinéale est impliquée dans le contrôle photopériodique de la reproduction, bien que tous les mécanismes d’action ne soient pas encore connus. Toutefois, si l’on considère les cycles de reproduction de l’ensemble des Vertébrés du monde, de nombreux facteurs autres que la photopériode, tels que la température, l’humidité, le régime des pluies, la nourriture..., interviennent dans le contrôle des cycles de reproduction et certains de ces facteurs ont un effet sur le système reproducteur faisant intervenir la glande pinéale.Si la glande pinéale n’était qu’un intermédiaire entre les variations annuelles de la photopériode et l’activité reproductrice, elle deviendrait totalement inutile chez les animaux vivant dans les zones équatoriales ou tropicales, car la photopériode et l’intensité lumineuse y varient peu au cours de l’année. Il a été effectivement démontré qu’il existe des corrélations étroites entre le développement de la glande pinéale et la répartition latitudinale ou certaines adaptations comportementales (C. L. Ralph, 1975); les animaux possédant des pinéales bien développées (pinnipèdes, manchots, cervidés) vivent sous des latitudes élevées alors que les animaux qui ont des glandes pinéales peu développées (rhinocéros), voire absentes (édentés, pangolins, crocodiliens), vivent sous des basses latitudes.Cependant certains animaux des zones tropicales ou équatoriales ont des glandes pinéales bien développées présentant des signes d’activité de synthèse intense; leurs cycles de reproduction sont souvent déterminés par le régime des pluies. P. Pévet et B. Vivien-Roels (1980) ont suggéré que la glande pinéale était capable d’intégrer «via les dérivés indoliques» diverses informations concernant l’environnement (photopériode, température, humidité, nourriture), variables selon l’espèce, la localisation géographique, les conditions écologiques... Un tel concept offre l’avantage de permettre la prise en considération de l’ensemble des Vertébrés et en particulier des ectothermes chez lesquels la température est un facteur important de régulation de l’activité sexuelle.Chez les Reptiles par exemple, le fonctionnement de la glande pinéale, du moins en ce qui concerne la production de mélatonine, varie en fonction du cycle saisonnier de reproduction (B. Vivien-Roels, 1981). Chez une tortue terrestre, il a été démontré expérimentalement que ce n’est pas la photopériode mais la température qui contrôle, en partie du moins, les variations nycthémérales et saisonnières des concentrations de mélatonine épiphysaire et circulante de même que l’activité sexuelle saisonnière.2. Glande pinéale et thermorégulationDes corrélations étroites ont également été établies chez de nombreuses espèces entre le développement de la glande pinéale et le degré d’homéothermie. De plus, il est démontré que la glande pinéale et les organes qui lui sont souvent associés chez les Vertébrés inférieurs (œil pariétal des lézards, organe frontal des Batraciens ou organe parapinéal des Poissons) ont une fonction thermorégulatrice chez de nombreuses espèces (C. L. Ralph, 1979).La majorité des travaux a été réalisée chez les lézards dont les organes pariétaux (œil pariétal et épiphyse) sont généralement considérés comme des récepteurs de stimuli visuels ou thermiques (infrarouges). Chez de nombreuses espèces de lézards, l’ablation de l’œil pariétal provoque une hyperthermie alors que la pinéalectomie provoque une hypothermie. Chez les Oiseaux et les Mammifères, la pinéalectomie provoque également des dérèglements physiologiques et comportementaux de la thermorégulation.Parmi les substances synthétisées dans l’épiphyse, seule l’action de la mélatonine a été étudiée jusqu’ici. L’administration de mélatonine provoque un abaissement du seuil de polypnée thermique (halètement) chez le lézard. Elle diminue aussi la température corporelle chez le moineau ou la souris par exemple. De plus l’administration de mélatonine provoque également des dérèglements des cycles nycthéméraux de température corporelle qui existent chez de nombreuses espèces. Si les mécanismes de régulation restent encore mal connus pour l’instant, la mélatonine semble cependant être un élément prépondérant de la fonction thermorégulatrice de la glande pinéale.3. Glande pinéale et organisation circadienneDe nombreux paramètres physiologiques, biochimiques ou comportementaux présentent des rythmes nycthéméraux, rythmes qui en conditions constantes (éclairement continu ou obscurité totale) persistent avec des périodes d’environ vingt-quatre heures, appelées circadiennes (du lation circa , environ et dies , jour). Deux organes, la glande pinéale et le noyau supra-chiasmatique de l’hypothalamus, ont été considérés comme des composants possibles du système circadien des Vertébrés.Chez les Oiseaux, de nombreux travaux ont montré la participation de la glande pinéale dans la rythmicité circadienne. Chez le moineau par exemple, les rythmes de température corporelle, d’activité locomotrice (sautillement) sont supprimés par la pinéalectomie, ces rythmes pouvant ensuite être rétablis en implantant des glandes pinéales à ces animaux.Chez certains Poissons arctiques (550 de latitude nord), la pinéalectomie affecte de façon significative les rythmes d’activité, ces effets pouvant néanmoins présenter de grandes variations selon les saisons. La pinéalectomie modifie également l’activité locomotrice chez le lézard. De nombreux travaux montrent que la mélatonine est impliquée dans la rythmicité circadienne: la mélatonine épiphysaire est produite de façon rythmique et synthétisée la nuit quelle que soit l’espèce considérée.Des implantations sous-cutanées de mélatonine provoquent une arythmicité ou une augmentation de la période d’activité chez le lézard. L’effet de la mélatonine est considérablement augmenté chez les animaux préalablement pinéalectomisés. Des résultats similaires ont été observés chez les Oiseaux.À l’heure actuelle la glande pinéale semble impliquée principalement dans les problèmes d’adaptation de l’animal à son environnement, adaptation de l’organisation circadienne, de la thermorégulation ou adaptation de l’activité reproductrice qui est sans doute la plus importante, car c’est d’elle que dépend la survie des espèces. De nombreux travaux de recherche s’avèrent encore nécessaires pour préciser les mécanismes physiologiques mis en jeu. De plus, le problème est encore compliqué par le fait que l’œil latéral, la glande de Harder et l’intestin (organes tous en contact plus ou moins direct avec le milieu extérieur) synthétisent également des dérivés méthoxyindoliques comme la mélatonine ou la 5-méthoxytryptamine. Ces dérivés, qui réagissent aux variations naturelles ou expérimentales de l’environnement, pourraient donc être impliqués dans l’intégration des informations de l’environnement.• 1541; gr. epiphusis; cf. épi- et -physe♦ Anat.1 ♦ Extrémité renflée d'un os long, constituée de tissu spongieux.2 ♦ Petite glande située au-dessous du bourrelet du corps calleux, entre les tubercules quadrijumeaux antérieurs du cerveau (cf. vx Glande pinéale).Synonymes :- glande pinéaleépiphysen. f. ANATd1./d Extrémité des os longs.d2./d Glande située dans le cerveau à la partie postérieure du 3e ventricule, dont le rôle est mal connu, et qui se calcifie chez l'adulte.⇒ÉPIPHYSE, subst. fém.ANATOMIEA.— Chacune des deux extrémités renflées d'un os long, constituées de tissu spongieux. Elle [la tuberculose osseuse] atteint le plus habituellement les os spongieux, à moelle rouge, ou le voisinage des surfaces cartilagineuses entre l'épiphyse et la diaphyse, ou bien le périoste (CALMETTE, Infection bacill. et tubercul., 1920, p. 201).B.— Épiphyse cérébrale. ,,Glande de la grosseur d'un pois, située à la jonction des faces postérieure et supérieure du troisième ventricule`` (Méd. Biol. t. 2 1971). Synon. glande pinéale. La glande pinéale, dont Descartes faisait le siège de l'âme, et que nous appelons aujourd'hui épiphyse, est sans action connue sur le psychisme, non plus que les endocrines provenant du pancréas (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 172).Rem. On rencontre ds la docum. le dér. épiphysite, subst. fém. Inflammation d'une épiphyse. Voici une jeune femme accusant des douleurs dorsales tenaces, les radiographies ont montré des lésions certaines d'épiphysite (RAVAULT, VIGNON, Rhumatol., 1956, p. 589).Prononc. et Orth. :[epifi:z]. Ds Ac. 1762. Étymol. et Hist. 1541 [éd. 1555] (J. CANAPPE, Tables anat., 102 r°). Empr. au gr.
« croissance, excroissance » en partic. « épiphyse, excroissance cartilagineuse à l'extrémité d'un os ». Fréq. abs. littér. :6.
DÉR. Épiphysaire, adj. Relatif à l'épiphyse des os ou à la glande pinéale. Cartilage, décollement, tumeur épiphysaire. Chez l'enfant myxoedémateux, le noyau épiphysaire au lieu de former un nodule à bords nets se présente comme une trame fragmentée et disséminée (RAVAULT, VIGNON, Rhumatol., 1956, p. 548). — 1re attest. 1832 (RAYMOND); du rad. de épiphyse, suff. -aire.épiphyse [epifiz] n. f.ÉTYM. 1541; grec epiphusis, de epi « sur », et physis « croissance ». → Épi-, et -physe.❖♦ Anatomie.1 Extrémité renflée (d'un os long), constituée de tissu spongieux (→ Diaphyse, cit.).0 Les extrémités ou épiphyses, généralement plus volumineuses que le corps nous présentent une ou plusieurs surfaces lisses pour s'articuler avec les os voisins et, autour de ces surfaces articulaires, des éminences ou des cavités rugueuses pour l'insertion des ligaments ou des muscles.L. Testut, Traité d'anatomie, t. I, p. 7.2 (1893, Grande Encyclopédie). Petite glande située au-dessous du bourrelet du corps calleux, entre les tubercules quadrijumeaux antérieurs du cerveau. — Syn. (vx) : glande pinéale.❖DÉR. et COMP. Épiphysaire, épiphysectomie.
Encyclopédie Universelle. 2012.